Disponible le 25 octobre
C’est une drôle d’histoire ! D’un chef-d’œuvre réputé illisible – Finnegans Wake que James Joyce mit dix-sept ans à écrire –, le « compositeur de jazz » André Hodeir tira Anna Livia Plurabelle, une « jazz cantata » réputée injouable sur scène de par son effectif et la difficulté de son exécution ; projet insensé alors que les improvisateurs « free » de l’époque semblaient écrire un avenir définitif pour le jazz, affranchi de la partition.
Enregistrée en 1966 dans les studios de Radio France, l’œuvre serait restée inédite, si le vibraphoniste John Lewis n’avait décidé de la publier sur disque aux États-Unis en 1971. Rééditée en France à deux reprises du temps du microsillon, elle serait restée inconnue au temps du numérique si Patrice Caratini n’avait eu l’idée de la créer sur scène et sur CD en 1992, puis d’en proposer en 2021 sa reprise à la tête de l’ONJ que son directeur artistique Frédéric Maurin mettait à sa disposition. Victime de la pandémie de Covid, elle ne fut hélas donnée qu’une fois en concert, mais par bonheur enregistrée et filmée par Radio France pour diffusion sur France Musique.
Par son essai André Hodeir & James Joyce, un éloge de la dérive, Franck Bergerot démontre que, contrairement aux procès qui lui avait été faits autrefois, cette Anna Livia Plurabelle ouvrait la voie à bien des expériences qui ont animé l’Histoire du jazz depuis un demi-siècle en matière structurelle, d’écriture et de texture orchestrales. Connu pour ses ouvrages d’initiation à l’Histoire du jazz et plus particulièrement à l’œuvre de Miles Davis, la plume de Franck Bergerot est omniprésente depuis les années 1970 dans la presse française consacrée au jazz. Il a mis à profit son sens de l’écoute et du récit, de l’analyse et de la métaphore, pour raconter le destin d’André Hodeir, la genèse de l’œuvre de James Joyce, les cheminements de l’esprit qui ont conduit le compositeur à faire œuvre musicale en partant d’extraits d’Anna Livia Plurabelle (tiré du huitième chapitre de Finnegans Wake).
Enfin, sur le mode du compte rendu sportif, il décrit son déroulement dans l’ordre chronologique, ses audaces, ses prises de risque, ses marques d’humour et cet art de la dérive et du glissement auquel on doit la cohérence de ce développement musical d’un seul tenant, sans reprise ni redite. Il offre ainsi un commentaire minuté de l’œuvre disponible à l’écoute pour les acquéreurs de l’ouvrage.
Où l’on découvre comment d’un monument littéraire illisible, André Hodeir a tiré la matière sonore, orchestrale et imaginaire d’une « jazz cantata » qui, aujourd’hui, n’a pas pris une ride.
Maison de la Radio et de la Musique
Studio 104 – 6 mars 2021 – Jazz sur le Vif
Elliona mezzo-soprano
Chloé Cailleton contralto
Patrice Caratini direction
ORCHESTRE NATIONAL DE JAZZ
Direction artistique Frédéric Maurin
Catherine Delaunay clarinette
Julien Soro saxophones alto et soprano
Rémi Sciuto saxophones alto et sopranino, clarinette, flûte
Clément Caratini saxophones alto et soprano, clarinette
Fabien Debellefontaine saxophones ténor, alto et soprano, clarinette
Matthieu Donarier saxophones ténor et soprano, clarinette
Christine Roch saxophones ténor, clarinette
Sophie Alour saxophones ténor et soprano, clarinette
Thomas Savy saxophone baryton, clarinette
Frédéric Couderc saxophones basse et ténor, clarinette
Claude Egea trompette
Fabien Norbert trompette
Sylvain Bardiau trompette, bugle
Denis Leloup trombone
Bastien Ballaz trombone
Daniel Zimmermann trombone
Stéphan Caracci vibraphone
Aubérie Dimpre vibraphone
Julie Saury batterie
Benjamin Garson guitare électrique
Robin Antunes violon
Raphaël Schwab contrebasse