Les Lettres du Volcan 1/2
Naissance d’un objet sonore entre publics éloignés
Pendant plusieurs semaines, une classe de 5ème du collège Maréchal Leclerc et une vingtaine de demandeurs d’asile de l’HUDA (Hébergement d’Urgence pour Demandeurs d’Asile) ont travaillé ensemble sur l’écriture d’un échange épistolaire. Encadrés par le metteur en scène Yan Tassin, INSULA ORCHESTRA et l’ONJ, ces lettres ont ensuite été mises en musique et en sons lors d’un enregistrement.
L’objectif principal de ce projet collaboratif était l’enregistrement d’un objet sonore. Le processus de création impliquait l’écriture de quatre lettres, chacune rédigée en réponse à la lettre précédente, et la création de plusieurs moments musicaux, reflets des différents passages évoqués dans ces écrits.
« Les lettres du Volcan » suivent l’histoire rocambolesque d’Eden Lyonard et de sa sœur, Sasha, qui lui demande de se cacher sur l’île de Souvaléréma avec des dossiers secrets. À la suite de diverses péripéties, on découvre que les dossiers, qui lui ont été confiés, sont faux. Détenus par Sasha depuis le début, on apprend que les vrais documents renferment la preuve de l’héritage d’Eden et la carte codée qui mène au trésor familial : l’hymne de Volcandiland, qui désigne Eden comme le futur roi de ce pays fantastique.
La première séance du projet a consisté en une rencontre entre les deux groupes, permettant de briser la glace et de faire plus amplement connaissance. Pendant cette séance commune d’introduction, les deux groupes ont également pu écouter certains morceaux proposés par Frédéric Maurin, directeur artistique de l’Orchestre National de Jazz.
Pour l’écriture des lettres, les quatre séances de rédaction ont été encadrées par Yan Tassin, metteur en scène. Au collège de Puteaux, les élèves se sont chargés d’écrire la première lettre en choisissant les éléments introductifs de l’histoire. Répartis en petits groupes, les élèves ont fait preuve d’imagination concernant les lieux de départ et d’arrivée des lettres, puisqu’ils ont choisi des endroits imaginaires. Quant aux autres groupes, ils ont été chargés de choisir les personnages principaux et leurs traits de caractère et physiques, mais aussi le moment où se déroulait l’histoire.
Il a été plutôt surprenant de constater une rupture dans les idées des différents groupes, avec le personnage de Sasha, figure politique, féministe et écologique, d’un côté et le monde fantastique de bonbons, d’un autre côté.
Les demandeur·euses d’asile ont ensuite répondu avec leur propre lettre en se basant sur la première lettre ; ce processus a ensuite été répété pour les lettres suivantes. Si la barrière de la langue avait été appréhendée, la fracture culturelle entre les deux groupes s’est ressentie ici : les demandeur·euses d’asile étaient assez confus face à l’imagination des élèves et à leur manque de cohérence et de réalisme. Au contraire, les élèves n’ont pas été trop déstabilisés par ce côté très terre-à-terre des adultes; ils étaient toujours très enthousiastes à l’idée de découvrir la réponse à leur lettre ! Après cinq séances intensives, l’échange épistolaire était terminé.
Lors de la sixième séance, les groupes ont été une nouvelle fois réunis afin d’imaginer les potentiels moments musicaux des différentes lettres : ellipses musicales, interludes, improvisations des musiciens, bruitages, improvisations collectives, etc. Ils devaient également réfléchir à la manière de réaliser le son et choisir à quel endroit ils souhaitaient le positionner. La dernière séance a été consacrée à l’enregistrement des différentes lettres à la Seine Musicale, avec l’appui du Stephan Caracci (vibraphone, marimba), Judith Wekstein (trombone) et Frédéric Maurin (guitare électrique).
Entre lecture des passages et bruitages des lettres, chaque personne jouait un rôle bien défini, tout en participant activement aux différentes improvisations collectives proposées par les musiciennes et musiciens de l’ONJ. C’est comme ça que demandeur·euses d’asile, élèves et musicien·nes ont su recréer le bruit de la pluie, en tapotant avec leurs doigts au creux de la paume de leur main !
Au final, ce projet « Chemin des Arts » a permis de rassembler de jeunes collégien·nes et des demandeur·euses d’asile autour d’une création artistique commune qui reflétait leur créativité et leur imagination. C’est une belle initiative qui a permis de briser les barrières sociales, culturelles et linguistiques, et de promouvoir l’inclusion et l’ouverture d’esprit. Le projet a été une expérience très enrichissante !
Emma Pignolet de Fresnes,
Volontaire en service civique à l’ONJ.
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