Dans le studio de danse du Théâtre Paul Éluard de Bezons, des silhouettes se meuvent lentement au rythme des notes égrenées par la guitare tandis que résonnent doucement les tintements des cymbales. Les corps se déplacent progressivement, à l’affût, les doigts contractés comme s’ils étaient sur le point d’attraper ou de griffer leur proie.
Toutes et tous semblent à la recherche d’un objet, d’une personne, ou plutôt dans l’attente d’un moment très précis. Soudain, les douze coups de minuit retentissent, martelés à la batterie de plus en plus rapidement. Voilà les corps qui s’agitent et se soulèvent. La transformation est inévitable… Une multitude de Dracula s’éveillent sur le plateau et s’animent au son de la musique rock et enflammée jouée par Rafaël Koerner et Christelle Séry, batteur et guitariste de l’Orchestre National de Jazz.
Cette scène prend place dans le cadre de l’un des six ateliers mêlant jazz et théâtre organisés par l’ONJ en partenariat avec le TPE de Bezons et le Foyer La Cerisaie. Au cours des mois d’avril, de mai et de juin, trois musicien•ne•s et une comédienne de l’ONJ sont allé•e•s à la rencontre de Léa, Vincent, Christiane, Christian, Adrien, Éric, Sébastien, Cédric ainsi que Catherine et Gildas, dix adultes en situation d’handicap psychique, résident•e•s du foyer La Cerisaie. Ils ont également fait la connaissance de Manuel, leur professeur de chant et de théâtre depuis de nombreuses d’années. La première rencontre, le 7 avril, constituait le premier temps d’un échange artistique et d’un travail collectif au long cours, fait de découvertes et d’initiations à l’univers du jazz d’une part, au royaume de Dracula d’autre part. Pour compléter la série d’ateliers, les participant.e.s assisteront à une représentation du spectacle Dracula à l’automne 2021.
Lors de chaque atelier, les artistes, constitués en duo, invitent les participant.e.s à s’exprimer par la voix, le geste ou la danse à travers des activités qui tiennent compte de leur handicap. Celles-ci peuvent être construites autour de la découverte d’un timbre instrumental : au son de la trompette ou de la guitare, répond un.e ou plusieurs participant.e.s en utilisant le moyen de communication qui lui sied le plus. L’un•e propose une phrase musicale – un son, une mélodie ou un rythme – l’autre réagit en fonction de ce que cette proposition lui inspire – un mot, un son, un mouvement corporel, une attitude, une émotion… Ensemble, ils improvisent la suite du dialogue.
Ces exercices sont l’occasion d’entrer dans la peau du personnage principal du spectacle, Dracula. En jouant à incarner le célèbre vampire, les participant.e.s travaillent à comprendre sa démarche, ses motivations, sa personnalité, et envisagent ainsi ce personnage mythique dans toute sa complexité.
Lors de ces ateliers, les musicien•ne•s cherchent également à plonger les participant•e•s dans l’atmosphère des scènes principales du spectacle, en choisissant de les placer dans une posture active et créative. Ensemble, ils reconstituent l’ambiance sonore du début du spectacle, climat à la fois mystérieux et angoissant de la forêt où erre la jeune Mina à la recherche de sa mère. Pour ce faire, les artistes disposent sur des chaises des petites percussions (claves, petits gongs, grelots, cymbales…) et des objets amenés par les résident.e.s (bouteilles remplies de riz, de sable…) puis invitent les participant.e.s à les manipuler librement, tandis qu’eux-mêmes improvisent. Ce travail à la fois individuel et collectif est l’occasion pour les participant•e•s de s’exprimer librement en étant pleinement impliqué•e•s dans la création artistique.
Avec Milena Csergo (comédienne), Quentin Ghomari (trompette), Rafaël Koerner (batterie) et Christelle Séry (guitare).
Les ateliers menés en partenariat avec le foyer La Cerisaie et le TPE de Bezons sont soutenus par la Fondation Géotec.
Un documentaire réalisé par Romain Al’ et Slaven Rebelo retrace les échanges entre les artistes et les participant•e•s au cours des ateliers :
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